Chemins de Traverse #25 – Julien Larrenduche

Julien, du marketing sportif à
la Responsabilité Sociétale des Entreprises

« C’était comme si une quarantaine d’heures par semaine je rangeais ces convictions
au fond d’un tiroir de mon bureau (…)
»

1/ En quelques mots, qui es-tu ?

Difficile de répondre, surtout en quelques mots… Je suis une personne qui aime apprendre de nouvelles choses en permanence et qui cherche à assumer ses convictions au quotidien y compris dans son activité professionnelle.
Après une longue période de réflexion et remise en question, je cherche désormais à être acteur de la transition écologique et solidaire à mon échelle aussi bien sur mon temps personnel qu’au niveau professionnel.

2/ Quel est ton parcours ?

J’ai suivi un schéma très classique : bac général, classe préparatoire, « grande école » de commerce pendant laquelle j’ai effectué différents stages et alternances d’abord en marketing sportif puis en gestion de projet de transition digitale pour une banque.
Une fois diplômé, j’ai rejoint une agence de conseil en marketing, communication et média. D’abord pour travailler sur le lancement et le développement de projets en Espagne et Belgique, puis plus globalement sur différents projets en France et à l’étranger. Ces projets consistaient très majoritairement à mettre en place et à gérer des prestations de mesure et de contrôle de la qualité de distribution des catalogues publicitaires (de nos clients) dans les boîtes-aux-lettres.
Après 3 ans au sein de cette agence j’ai pris la décision de la quitter pour essayer de me recentrer sur moi et prendre un peu de recul sur cette activité. S’en est suivie près d’une année et demie de transition et de remises en question.
Aujourd’hui cela fait bientôt un an que je suis devenu chef de projet RSE/Développement Durable dans une entreprise de distribution de produits alimentaires aux professionnels de la restauration.

3/ Comment est venu ton désir de changement ? A quel moment ? Et quel a été ton déclic ?

C’est plutôt un ensemble de déclics et de réflexions qui m’ont amené à ce désir de changement.
Je travaillais depuis deux ans dans cette agence où mon travail était stimulant et où l’entente avec les équipes était vraiment géniale. Et pourtant, en rentrant de quelques semaines de vacances j’ai commencé à regarder le chemin parcouru et à me poser les questions « pourquoi ? » et « comment ? »
C’est avec ces questionnements que j’ai commencé à réaliser que j’étais rentré dans un schéma qui ne me convenait pas. Je n’étais plus sûr de faire ce que j’avais envie de faire ni même ce pourquoi j’avais suivi ces études.

En parallèle, je m’engageais de plus en plus sur le chemin de la transition écologique dans ma façon de vivre, les événements auxquels je participais, les rencontres que je faisais,… Mais c’était comme si, une quarantaine d’heures par semaine je rangeais ces convictions au fond d’un tiroir de mon bureau et continuais à prôner indirectement la distribution de catalogues publicitaires en boîte-aux-lettres.
Cette schizophrénie avait assez duré et je ne voulais plus me sentir « passif » vis à vis de cette transition que j’appelais de mes vœux. C’est cet ensemble de réflexions qui m’a poussé à passer à l’acte. J’ai d’abord songé à demander un congé sabbatique, mais j’ai vite réalisé que je ne reviendrais plus dans mon entreprise une fois parti. J’ai donc décidé de démissionner.
Mais ce n’était que le début d’une longue réflexion et d’une transition professionnelle qui est toujours en partie en cours…

4/ Qu’est-ce qui t’a permis de passer de l’envie à l’action ? Quels ont été tes leviers ?

Il faut se le dire, démissionner et quitter un CDI est un luxe. J’ai eu la chance d’obtenir une rupture conventionnelle qui m’a permis de toucher des indemnités chômage et j’avais pu mettre un peu d’argent de côté de façon à pouvoir survivre à une période relativement longue d’inactivité professionnelle. Sans cela tout aurait sans doute été plus long et plus compliqué.

Le passage à l’action s’est aussi fait par la décision de partir en voyage seul. J’avais besoin d’une rupture franche, presque brutale avec le monde et le milieu dans lequel j’évoluais. C’était quelque part une sorte de voyage initiatique qui devait me permettre de me retrouver et de définir mes valeurs et les convictions auxquelles je ne voulais plus déroger. N’allez pas croire pour autant qu’il suffit de partir avec un sac à dos pour obtenir des réponses ; je suis revenu avec plus de questions que de réponses, mais ce fut un passage nécessaire pour moi.
Pour m’aider à y voir plus clair, j’ai aussi pu bénéficier d’un programme de pôle emploi nommé « Activ Projet ». Grâce à ce programme j’ai pu obtenir quelques rendez-vous avec une psychologue du travail qui m’a aidé à formuler mes questionnements et à y voir un peu plus clair.

Mon entourage a aussi été d’un soutien précieux. Tous n’ont pas compris ma démarche mais certaines personnes en particulier ont nourri mes réflexions, m’ont écouté et m’ont soutenu dans les périodes où l’incertitude et le doute prenaient le dessus.
Enfin, j’ai rapidement ressenti le besoin de me rendre « utile » et j’ai profité de cette période d’inactivité professionnelle pour m’investir dans des associations notamment sur le voyage « responsable » et l’accompagnement des initiatives en faveur d’une société écologique et solidaire. J’y ai rencontré beaucoup de personnes dans la même situation que moi mais surtout cela m’a permis de me mettre en mouvement et d’entrer dans une démarche positive.

5/ Quels freins as-tu rencontrés dans ton parcours ? Et comment les as-tu surmontés ?

Un des premiers freins rencontrés concerne le volet financier. Comme je l’évoquais précédemment ce n’est pas donné à tout le monde de quitter un CDI et je suis conscient de la chance que j’ai eu d’obtenir cette rupture conventionnelle.
Un autre frein majeur concerne le regard des autres et une certaine pression sociale. On nous a inculqué qu’on ne quitte jamais un CDI sans rien derrière et les personnes sans activité professionnelle ou au chômage sont bien trop souvent vues comme des parasites vivant au crochet de la société. Honnêtement je n’ai jamais autant redouté la fameuse question « tu fais quoi dans la vie ? ». Pour surmonter cela je n’ai pas de solution miracle, à part peut-être réaliser que les gens projettent souvent leur propres peurs sur vous mais qu’au final beaucoup aimeraient suivre ce chemin aussi.

A force d’accumuler les questions par moment, on peut rentrer dans une sorte d’immobilisme. On cultive les questions sans trouver de réponse et on a l’impression de passer son temps à ne rien faire. Pour surmonter cela j’encourage à rentrer dans une démarche plus positive, forcer le destin en quelques sortes, aller rencontrer de nouvelles personnes dans les secteurs d’activités qui nous intéressent, participer à des événements, des tables rondes, des projections, ou encore s’investir dans des associations. En plus de toutes les rencontres dont on se nourri dans ces moments-là, cela permet aussi d’initier un mouvement, d’aller de l’avant.

Enfin, je ne cache pas que c’est un processus qui peut être long et pendant lequel on peut passer par des moments de solitude, où on a l’impression de se perdre. Pour surmonter ces moments, j’ai eu la chance d’être accompagné par des personnes qui ont su m’écouter, mais aussi me rebooster ou me « mettre un coup de pied au cul ».

6/ Aujourd’hui, où en es-tu ? Pourquoi avoir choisi cette voie ? Et qu’est-ce qui fait sens pour toi dans ta vie pro/perso ?

Aujourd’hui je suis donc Chef de Projets RSE / Développement Durable au sein d’une grande entreprise de la distribution alimentaire aux professionnels de la restauration.
Travailler dans une grande entreprise n’a jamais été mon ambition, mais cherchant à être acteur de la transition écologique je me suis dit que ce type d’entreprise se dote souvent d’un service RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) ou Développement Durable ayant certains moyens financiers et surtout dont l’impact pour la société est non négligeable.
D’ailleurs l’alimentation est un enjeu crucial de la transition écologique et solidaire, et un tel groupe participe à l’alimentation quotidienne de millions de Français se restaurant hors de chez eux (cantine, restaurant, vente à emporter etc.).

A ce poste, j’ai l’impression de pouvoir vraiment jouer un rôle par mon travail au quotidien, je me sens bien plus utile.
Derrière cet intitulé un peu pompeux se cache en réalité un champ d’actions très large. Nous avons défini une politique RSE avec la direction et nous cherchons à atteindre les objectifs fixés à 5 ans. Nous travaillons donc sur les aspects humains (égalité Femme-Homme, intégration, formations, mobilité etc.), sur nos approvisionnements (impacts humains, environnementaux etc.) et notre impact environnemental direct (énergie, transport, déchets, etc.).
Nous sommes accompagnés par des experts des différents sujets : ONG, prestataires spécialisés, métiers spécifiques dans l’entreprise. J’apprends tous les jours grâce à ces personnes et c’est aussi un aspect très stimulant de mon nouveau poste.

Dans ma vie perso j’essaye de rester investi dans les associations auxquelles j’ai adhéré pendant cette période de transition même si le temps disponible s’est considérablement réduit.

7/ Quels conseils donnerais-tu à des personnes actuellement en questionnement ?

Prenez le temps de prendre du recul, de vous poser des questions sur votre situation actuelle et sur ce que vous aimeriez changer.
Renseignez vous, posez des questions, allez rencontrer des personnes qui sont dans la même position ou qui sont déjà passées par là.
Si vous avez déjà une petite idée de ce qui vous intéresse, creusez un peu plus, allez rencontrer des personnes dans cette branche pour vous rendre compte concrètement du métier ou du secteur d’activité.
Soyez acteur de votre transition, participez à des évènements, nourrissez votre réflexion par des livres, des films, des rencontres…
Mais surtout une fois la transition amorcée, essayez de vous placer dans une démarche positive. Pour moi cette démarche positive a commencé par un investissement associatif : se sentir utile et me rendre compte que j’étais loin d’être le seul dans cette situation.

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